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Arrêt de la Cour de cassation du 18 octobre 2024 (C.23.0486.N) : éclaircissements dans le cadre de la loi sur le bail commercial

Publié le : 05/11/2024 05 novembre nov. 11 2024

Le 18 octobre 2024, la Cour de Cassation a rendu un arrêt dans une affaire portant sur la résiliation d’un bail commercial par l’acquéreur d’un bien loué. Cet arrêt éclaire notamment la date de début du délai de trois mois visé à l’article 12 de la loi sur le bail commercial.

Cet article dispose : « Lors même que le bail réserverait la faculté d'expulsion en cas d'aliénation, l'acquéreur à titre gratuit ou onéreux du bien loué ne peut expulser le preneur que dans les cas énoncés aux 1°, 2°, 3° et 4° de l'article 16, moyennant un préavis d'un an donné dans les trois mois de l'acquisition et énonçant clairement le motif justifiant le congé, le tout à peine de déchéance. Il en va de même lorsque le bail n'a pas date certaine antérieure à l'aliénation, si le preneur occupe le bien loué depuis six mois au moins.»

Les faits

Le bail commercial initial a été conclu le 29 janvier 1993 et renouvelé par la suite. Le 18 janvier 2019, le bailleur a accordé une option d’achat qui a été exercée. Le 11 décembre 2019, la transmission du bien loué a eu lieu par acte notarié. Peu après, et en tout cas dans les trois mois suivant cet acte, le nouvel acquéreur a envoyé un congé au locataire, en respectant un délai de préavis d’un an, comme l'exigent les articles 12 et 16 de la loi sur le bail commercial.

Le locataire a contesté ce congé, soutenant que le nouveau propriétaire avait dépassé le délai de trois mois après le transfert de propriété, car il s’était comporté en propriétaire dès août 2019 et percevait le loyer depuis octobre 2019, ce qui impliquait, selon lui, un départ du délai de 3 mois anticipé.

Le tribunal de première instance, puis la cour d’appel, ont jugé que la résiliation de l’acquéreur était bien intervenue dans le délai requis, considérant que le délai de trois mois commençait à courir à compter de la date de l’acquisition le 11 décembre 2019.

Le locataire a formé un pourvoi en cassation, arguant que la résiliation devait être annulée en raison de la confiance légitime suscitée et que le délai légal aurait dû commencer plus tôt.

L’arrêt

Il est connu qu’au cours des dernières décennies, la doctrine a beaucoup débattu à propos de la date de début de ce délai de trois mois. Certains estiment que l’acquisition coïncide avec la date du compromis de vente, d’autres avec celle où ce compromis prend date certaine. La majorité de la doctrine penche cependant pour le moment où la jouissance du bien loué est transféré et qu’elle devient opposable aux tiers.

La décision de la Cour de cassation, bien que non révolutionnaire, est intéressante pour deux raisons.

Premièrement, la Cour précise que l’acquéreur peut résilier le bail commercial dans un délai de trois mois à compter du moment où il acquiert un droit réel sur le bien lui permettant d’en jouir. Le simple fait d’agir comme titulaire d’un droit réel sur le bien, comme percevoir le loyer avant l’acquisition de ce droit réel, ne suffit pas. Il doit s’agir d’une véritable « aliénation » ou « transmission du bien loué », comme le titre du chapitre 6 de la loi sur les baux commerciaux le suggère. La simple détention d’une option n’entraîne pas le début du délai.

Ce qui aurait pu clore tout débat, c’est l’affirmation que l’acquisition du droit réel doit se faire de manière opposable aux tiers. Cet arrêt ne se prononce pas sur ce point.

Enfin, la Cour déclare qu’il n’existe pas de principe général de respect des attentes légitimes d’un tiers. Ainsi, elle souligne que la théorie de l’apparence n’a pas de fondement légal.
 

Auteur

Jean-Rodolphe Dirix
Avocat Associé
XIRIUS IMMO
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